Suite Ă nos Pistes et propositions pour un tourisme durable et solidaire en Europe et notre grande dĂ©ception concernant la confĂ©rence European Tourism Convention organisĂ©e par la Commission EuropĂ©enne le 12 octobre dernier, une quinzaine de dĂ©putĂ©.e.s europĂ©ens.nes et leurs assistant.e.s ont acceptĂ© d’Ă©changer sur nos propositions ainsi que des fonctionnaires de la Commission europĂ©enne. Ils reprĂ©sentent plusieurs États membres et un large Ă©ventail politique. Nos rĂ©seaux du tourisme social et durable ont aussi rĂ©pondu Ă notre appel. Nous sommes maintenant 20 agences de voyage en Europe Ă le cosigner. Nous partageons ce que nous avons retenu de ces Ă©changes et les suites possibles.
Tout d’abord, nous tenons à remercier l’ensemble de ces personnes pour la qualité du dialogue, le temps passé et les suites données. Notre demande partait du constat de l’invisibilité de nos pratiques au niveau statistique, commercial sur les principales plateformes numériques et politique au niveau des instances européennes.
Nous avons discuté de cette situation, de nos six propositions de coopération et du rapport sur le tourisme durable Establishing an EU Strategy for Sustainable Tourism de la députée portugaise Cláudia Monteiro de Aguiar soumis à amendements.
En préalable, écrit ici de manière caricaturale, nous avons précisé que pour nous le tourisme durable ne pouvait pas se limiter à un tourisme sans avion, portant en soi le risque de discriminer les destinations comme les îles et une stratégie de repli sur soi des États privilégiant ainsi le tourisme “à la maison” qui est déjà une réalité pour la majorité des vacanciers.
Il ne pouvait pas non plus se limiter à une critique du tourisme de masse, représentant elle un risque de discrimination des touristes les moins aisés voyageant en groupe pour in fine à nouveau privilégier les touristes à fort pouvoir d’achat.
Ces deux approches mettent sous le tapis la responsabilité environnementale de l’ensemble de la filière qui ne se limite pas au seul transport et leur responsabilité sociale dans un secteur fortement précarisé et dont la situation sociale est devenue dramatique avec la crise pandémique.
Enfin, c’est oublier que la libre circulation est un droit humain qui reste encore un privilège, les congés payés une conquête sociale et le voyage une formidable opportunité de transformation sociale et de dialogue interculturel.
1 – La recherche de nouveaux outils statistiques de mesure du tourisme
Notre constat est que les statistiques dont nous disposons pour construire les politiques publiques et nos stratégies d’entreprise sont trop partielles et partiales. Elles sont partielles car elles ne mesurent que les retombées positives du tourisme et partiales car elles sont fournies essentiellement par l’industrie du tourisme et les grandes plateformes numériques.
Notre proposition est que l’Europe publie des donnĂ©es sur les externalitĂ©s nĂ©gatives comme durables du voyage. Voici quelques pistes qui nous semblent faisables et intĂ©ressantes : le coĂ»t d’une politique publique touristique ; la part des achats locaux sur un sĂ©jour ; le niveau de rĂ©munĂ©ration et de protection sociale des emplois créés localement ; l’impact environnemental global d’un sĂ©jour ; le nombre de lits accessibles aux personnes porteuses de handicape ; la part des offres d’accès aux vacances pour tous dans l’offre touristique ; l’accès des habitants aux offres et Ă©quipements touristiques ; la part de l’hospitalitĂ© non touristique dans l’offre globale ; la contribution du tourisme aux services publiques locaux ; le niveau de participation des habitants Ă la gouvernance touristique ;l’impact du tourisme sur le marchĂ© foncier d’habitation et commercial ;
Nous sommes favorables Ă la proposition d’une agence europĂ©enne qui fournirait ces informations tout en Ă©tant attentifs Ă la place qu’elle laisserait Ă l’industrie touristique dans sa gouvernance au regard de l’expĂ©rience des agences dĂ©jĂ existantes au niveau national comme international.
2 – Un outil simple d’affichage de l’impact Ă©cologique d’un sĂ©jour
Plusieurs député.e.s. nous ont fait part de leurs entretiens avec des représentants de l’industrie du tourisme et des plateformes numériques qui avaient tous à cœur de rendre leurs pratiques touristiques plus durables.
Une norme europĂ©enne permettrait d’afficher simplement le degrĂ© de durabilitĂ© d’un sĂ©jour (comme cela existe pour les machines Ă laver classĂ©es de A Ă E en Europe) et pourrait ĂŞtre utilisĂ©e de manière volontaire par les opĂ©rateurs souhaitant ĂŞtre transparents sur leur degrĂ© d’investissement en faveur de la planète. Une norme publique permettrait d’évaluer l’impact environnemental et social d’un sĂ©jour en intĂ©grant la mobilitĂ©, l’hĂ©bergement, l’alimentation et les activitĂ©s.
3 – Un rĂ©seau international d’acteurs du voyage durable nous permettant de coproduire des sĂ©jours itinĂ©rants
L’annĂ©e 2021 sera en Europe celle du rail et les agences qui ont co signĂ©es notre appel sont volontaires pour promouvoir les mobilitĂ©s douces dans leur ensemble et le rail en particulier. Cela rĂ©pond aussi Ă la demande croissante de voyageurs du Nord de l’Europe de pouvoir se rendre au Sud de l’Europe sans avion et en privilĂ©giant le train. Si le sĂ©jour devient itinĂ©rant pour Ă©viter les longs trajets en train, alors il faut pouvoir identifier Ă chaque escale un partenaire en tourisme durable pour co construire le sĂ©jour. Aujourd’hui il n’existe pas de rĂ©seau europĂ©en des agences de voyage durable et certaines destinations sont sans agence rĂ©ceptive de cette nature. L’annĂ©e europĂ©enne du Rail nous semble une bonne opportunitĂ© pour mettre en rĂ©seau ces agences Ă l’échelle europĂ©enne.
4 – la contribution locale
Le tourisme durable n’est pas pour nous un tourisme qui assumerait sa responsabilitĂ© environnementale en reversant quelques euros pour la bonne cause. Nous prĂ©fĂ©rons une contribution locale qui peut avoir un impact direct sur la destination. Elle peut ĂŞtre un prĂ©texte Ă un Ă©change culturel entre les voyageurs et les habitants autour de problĂ©matiques environnementales locales. Dans nos pratiques, elle peut s’intĂ©grer au programme du sĂ©jour et au territoire d’accueil comme par exemple quand en Sardaigne les voyageurs passent une journĂ©e à prendre soin d’une forĂŞt aux cĂ´tĂ©s des bergers et forestiers sardes.
5 – Le renforcement en sĂ©jour des circuits courts avec le monde agricole local
L’intĂ©gration des sĂ©jours dans les territoires passe en grande partie par la mise en place de circuits courts notamment alimentaires. C’est l’occasion d’une dĂ©couverte culturelle et de soutenir des agricultures locales comme celles promues par le mouvement slowfood. Le petit dĂ©jeuner continental ou le menu touristique sont trop souvent proposĂ©s par l’industrie du tourisme sans tenir compte du monde agricole local. Cette pratique est mise en place afin que l’Ă©conomie prĂ©sentielle gĂ©nĂ©rĂ©e par le voyageur profite prioritairement aux producteurs locaux.
6 – la considĂ©ration des pratiques d’hospitalitĂ© ouvertes Ă l’ensemble des personnes de passage
Les standards, intermĂ©diations et logiques tarifaires du système touristique ne rĂ©pondent plus Ă l’ensemble des besoins d’hospitalitĂ©. De nombreuses personnes de passage en sont exclues comme les saisonniers, les Ă©tudiants, les rĂ©fugiĂ©s, les habitants, les aidants ou les classes sociales dĂ©favorisĂ©es. La pandĂ©mie a accentuĂ© ce fossĂ© entre des offres d’hospitalitĂ© construites pour la seule clientèle touristique internationale et les besoins d’accueillir le personnel soignant, les personnes en tĂ©lĂ©travail, les rapatriĂ©s, les personnes en quarantaine, les personnes vulnĂ©rables et l’essor du voyage de proximitĂ©. Aujourd’hui une personne sur sept est appelĂ©e Ă voyager dans le monde, par choix ou obligation, et souvent en dehors de l’hospitalitĂ© touristique qui reste inadaptĂ©e. Il est temps de repenser le système touristique dans son ensemble pour aller vers des pratiques d’hospitalitĂ© non discriminantes au regard des crises climatiques, Ă©conomiques et sociales qui sont devant nous. C’est une question de droits humains et de respect de la dignitĂ© des personnes.
Les suites pour 2021
Les dĂ©putĂ©.e.s semblaient partager nos constats et propositions et plusieurs nous ont invitĂ©s Ă faire des retours sur leurs propositions d’amendement au texte sur le tourisme durable. Nous y avons retrouvĂ© l’ensemble de nos six propositions qui seront soumises au vote du Parlement europĂ©en.
Avec les agences cosignataires de notre appel, nous avons décidé d’être collectivement actifs pour l’année européenne du rail en 2021 en codéveloppant des offres de séjours.
Nous sommes invités lundi 30 novembre à participer à la prochaine commission des transports et du tourisme (TRAN) du Parlement européen : Hearing on « Future-proofing the Tourism Sector: Challenges and Opportunities Ahead. Nous allons partager avec les parlementaires européens à nouveau nos six propositions et en particulier notre volonté de collaborer à des études d’impacts à partir de nos pratiques pour co définir de nouveaux indicateurs touristiques et celle de collaborer à l’année européenne du Rail en 2021 comme opportunité de nous mettre en réseau et coopérer entre agences de voyage à l’échelle européenne.
Liste des agences et plateformes de voyage cosignataires

4 réponses sur « Appel européen des agences de voyage 🌿 »
[…] avoir publiĂ© nos propositions pour un tourisme social et durable en Europe et ĂŞtre intervenu au Parlement europĂ©en en novembre 2020 (voir la liste des agences signataires), […]
[…] sera l’annĂ©e du rail en Europe et les agences cosignataires de l’appel des Oiseaux de passage, se portent volontaires pour promouvoir la mobilitĂ© douce dans son […]
[…] et la Scop Ekitour, cosignataire avec un groupe d’agences de diffĂ©rents pays europĂ©ens de l’appel des Oiseaux de passage, se porte volontaire pour promouvoir la mobilitĂ© douce dans son ensemble, […]
[…] la suite, nos six propositions sont dĂ©finies dans le rapport du Parlement EuropĂ©en Ă©tablissant une stratĂ©gie EuropĂ©enne pour […]